Des chercheurs ont trouvé des peptides qui entrent dans les spermatozoïdes et les rendent moins mobiles, dévoilant ainsi une nouvelle piste pour mettre au point une pilule contraceptive masculine. D'autres projets suivant ce même objectif sont en cours ; un essai clinique a été suspendu en raison des effets secondaires.

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    Voilà des décennies que la recherche s'active pour mettre au point une pilule contraceptive pour les hommes et qu'elle n'est toujours pas disponible... Mais une équipe de chercheurs de l'université de Wolverhampton, qui étudiait les propriétés de peptides capables d'entrer dans les spermatozoïdes, a peut-être trouvé une piste prometteuse pour atteindre cet objectif.

    Les peptides appelés « bioportides » sont capables d'entrer dans la cellule et de modifier son fonctionnement. Ici, les peptides étudiés peuvent améliorer ou inhiber la motilité du spermatozoïde, en ciblant des protéines qui permettent son déplacement. Dans les expériences réalisées, les peptides pouvaient réduire la motilité des spermatozoïdes bovins et humains. Ils pourraient donc servir à l'élaboration de contraceptifs (pilule ou implantimplant sous-cutanésous-cutané par exemple).

    En parallèle, un essai clinique sur un contraceptif hormonal masculin a dû être arrêté en raison de ses résultats mitigés : l'injection efficace dans 96 % des couples conduisait à des effets secondaires (dépression, problèmes d'humeur, douleursdouleurs musculaires, acnéacné, libidolibido accrue). Le contraceptif utilisait une hormonehormone qui bloque la production de spermatozoïdes. Il y a eu quatre grossessesgrossesses chez les partenaires des 266 hommes participant à cette étude parue dans The Journal of Clinical Endocinology & Metabolism. Malgré tout, 75 % des hommes se sont déclarés satisfaits du traitement et prêts à continuer à l'utiliser s'il était disponible.

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    Article initial d’Agnès Roux, paru le 3/12/2013

    Des chercheurs australiens ont trouvé le moyen de rendre des souris mâles temporairement infertiles. Cette découverte pourrait conduire au développement d'une pilule contraceptive masculine. Encore faut-il surmonter certaines barrières scientifiques et culturelles. Les hommes seront-ils prêts à assumer la responsabilité de la contraceptioncontraception ?

    De tout temps, les populations humaines ont cherché des solutions pour s'épanouir dans leur sexualité sans pour autant procréer. En 1600 avant J.-C. déjà, les femmes de Mésopotamie utilisaient des pierres qu'elles s'introduisaient dans le vaginvagin pour éviter de tomber enceinte. Les premiers préservatifs, confectionnés à base d'intestins de petits animaux, auraient quant à eux vu le jour dans l'Égypte ancienne.

    Heureusement, depuis cette époque lointaine, beaucoup de progrès ont été réalisés dans ce domaine. Freinée par les réticences religieuses et culturelles, l'évolution des moyens de contraception a cependant pris du temps. En France, c'est seulement depuis le projet Simone Veil en 1974 que la contraception est complétement libéralisée dans le pays. Aujourd'hui, toutes les femmes, quel que soit leur âge, peuvent prendre la pilule et avoir une activité sexuelle sans craindre une grossesse non désirée.

    Pour qu’elle fonctionne correctement, la pilule contraceptive doit être prise tous les jours à la même heure. © Ceridwen, Wikipédia, cc by sa 3.0

    Pour qu’elle fonctionne correctement, la pilule contraceptive doit être prise tous les jours à la même heure. © Ceridwen, Wikipédia, cc by sa 3.0

    La pilule contraceptive est une méthode hormonale qui modifie le cycle naturel de la femme et bloque la libération de l'ovule par les ovairesovaires. Lorsqu'elle est correctement utilisée, elle empêche la survenue d'une grossesse dans presque 100 % des cas. Cependant, son usage n'est pas sans inconvénients. La prise de pilule peut en effet s'accompagner de troubles divers comme des nausées, des saignements, une prise de poids et une baisse de la libido. D'autre part, l'association du tabagisme et de la prise de pilules favorise le risque d'accidentsaccidents cardiovasculaires.

    Une méthode non hormonale sans risque pour la fertilité masculine

    Et si la gent masculine partageait un peu le fardeau des femmes ? Les recherches sur la contraception des hommes existent mais prennent du temps, probablement pour différentes raisons, à la fois médicales et culturelles. Les chercheurs travaillent sur une méthode qui bloquerait la fertilité temporairement sans pour autant perturber l'érection et la libido. Jusqu'à présent, aucune contraception fiable et sans effets secondaires n'a été trouvée.

    Des solutions commencent cependant à pointer le bout de leur neznez. L'année dernière par exemple, des chercheurs états-uniens ont découvert les vertus contraceptives d'une moléculemolécule, nommée JQ1, connue jusqu'alors pour ses effets anticancérigènes. Dans une étude récente, des scientifiques australiens de l'université Monash à Melbourne viennent de faire un nouveau pas en avant sur ce sujet. Leur approche est novatrice. Au lieu de chercher le moyen de bloquer la spermatogénèse, ils se sont intéressés à une stratégie alternative pour neutraliser temporairement la fertilité sans l'endommager. Leurs résultats, publiés dans la revue Pnas, pourraient conduire à l'élaboration d'une pilule contraceptive masculine sans effets secondaires majeurs.

    Pourrait-on inhiber la fertilité masculine en empêchant les spermatozoïdes de se déplacer ? Pour répondre à cette question, les scientifiques ont fabriqué des souris mâles mutantes ne synthétisant plus deux récepteurs protéiques, α1A et P2X1, tous deux impliqués dans le transport du spermesperme de l'épididyme, un petit organe accolé aux testicules, vers l'urètreurètre. Ils avaient vu juste : les rongeursrongeurs mutants, incapables d'éjaculer, sont devenus complétement infertiles. En revanche, l'activité sexuelle des mâles est restée la même. En d'autres termes, ils continuent de s'accoupler normalement, la seule différence étant l'absence d'éjaculation. Les chercheurs ont également montré que le sperme, bien qu'incapable de voyager jusque dans les organes génitaux des femelles, était de bonne qualité et pouvait être utilisé en vue d'une insémination artificielleinsémination artificielle.

    Les hommes sont-ils prêts à prendre la pilule ?

    Avec cette étude, les chercheurs ont pu identifier deux récepteurs cellulaires indispensables au transport du sperme et à la fertilité. Ce n'est que la première étape. Reste maintenant à mettre au point des médicaments capables de bloquer l'action de ces deux protéines, de manière temporaire. Les auteurs sont plutôt optimistes. Selon eux, un contraceptif oral pour les hommes devrait être disponible sur le marché d'ici une dizaine d'années. Mais de nombreuses études chez la souris et chez l'Homme sont encore nécessaires pour y parvenir. Il serait par exemple important de vérifier que ce traitement ne modifie pas le plaisir ressenti lors d'un rapport sexuel.

    Une fois ce contraceptif mis au point, encore faudra-t-il que la société soit prête pour de tels médicaments. « Les sondages nous montrent que les jeunes hommes d'aujourd'hui sont de plus en plus responsables vis-à-vis de la contraception », explique Sabatino Ventura, le directeur de l'étude. « Cette méthode contraceptive n'est pas hormonale et n'a pas d'impact sur le développement du sperme, ajoute-t-il. Les hommes auront probablement moins de réticence à la prendre. » Mais entre la théorie et la pratique, il y a souvent un fossé. Les mentalités évoluent mais les barrières culturelles sont ancrées et il faudra probablement du temps pour que la contraception masculine entre dans les mœurs.