Quelques repères dans le champ de la santé sexuelle 

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Qu’est-ce que la stratégie nationale de santé sexuelle ?

La première stratégie nationale de santé sexuelle a été lancée en 2017. Elle définit les grandes orientations nationales, partagées au niveau interministériel, en faveur d’une meilleure santé sexuelle de la population générale à l’horizon 2030.

Cette stratégie nationale de santé sexuelle investit le champ de la santé sexuelle et reproductive sous un angle global et positif

C’est un axe de Santé Publique prioritaire dont les orientations stratégiques s’articulent autour des grandes priorités suivantes :

  1. Promouvoir la santé sexuelle, en particulier en direction des jeunes ;
  2. Améliorer le parcours de santé en matière d’infections sexuellement transmissibles (IST), dont le VIH et les hépatites virales ;
  3. Améliorer la santé reproductive ;
  4. Répondre aux besoins spécifiques des populations les plus vulnérables ;
  5. Promouvoir la recherche, les connaissances et l’innovation en santé sexuelle ;
  6. Prendre en compte les spécificités de chacun, et notamment des populations vivant en outre-mer

Définition de la santé sexuelle et des droits sexuels

La santé sexuelle ne se limite pas aux aspects sanitaires

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : « La santé sexuelle est un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social en matière de sexualité, ce n’est pas seulement l’absence de maladie, de dysfonctionnement ou d’infirmité. La santé sexuelle exige une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles agréables et sécuritaires, sans coercition, ni discrimination et ni violence. Pour atteindre et maintenir une bonne santé sexuelle, les Droits Humains et Droits sexuels de toutes les personnes doivent être respectés, protégés et réalisés »1.

A noter que cette définition de l’OMS, depuis sa première version écrite en 1972 et publiée en 1974, a évolué au cours des années, en devenant notamment plus inclusive.

La toute première version, issue d’une réunion sur l’enseignement de la sexualité humaine dans les établissements formant les personnels de santé, définissait la santé sexuelle comme suit :

« La santé sexuelle suppose la réunion trois conditions fondamentales :

  • être capable de jouir d’un comportement sexuel et reproducteur en harmonie avec une éthique sociale et personnelle;
  • être exempt de sentiments de crainte, de honte et de culpabilité, de fausse croyances et autres facteurs psychologiques qui inhibent la réaction sexuelle et perturbent la relation sexuelle ;
  • être exempt de troubles, maladies et déficiences organiques qui interfèrent avec les fonctions sexuelles et reproductrices. »

Problèmes d’ordre sexuel et dysfonctions sexuelles

Il existe différents niveaux de problèmes d’ordre sexuel

1) Inquiétude

Le premier niveau de « problème d’ordre sexuel » concerne les inquiétudes. Celles-ci correspondent à « une appréhension ou à l’attente craintive de quelque chose » (crainte d’être anormal, crainte de ne pas bien faire, etc.)

Ce concept renvoie notamment aux normes, souvent dictées par les médias ainsi que par la pornographie.

2) Difficulté

Le second niveau concerne les difficultés, c’est-à-dire « les facteurs perturbant l’obtention d’un résultat positif, ou tendant à produire un résultat négatif ». Cela renvoi au ressenti de l’individu par rapport au résultat qu’il attend.

3) Dysfonction sexuelle

Les dysfonctions sexuelles sont définies par « la survenue de difficultés sexuelles qui surviennent de façon permanente ou récurrente » ; 

Il existe 9 dysfonctions actuellement définies dans le DSM-52

  1. L’éjaculation retardée
  2. Le trouble de l’érection
  3. Les troubles de l’orgasme féminin
  4. Les troubles de l’intérêt sexuel et de l’excitation chez la femme
  5. Les dyspareunies (douleurs lors de la pénétration) et les troubles de la pénétration (comme le vaginisme)
  6. Le trouble du désir sexuel hypoactif chez l’homme
  7. L’éjaculation prématurée
  8. Les dysfonctions sexuelles induites par une substance ou un médicament
  9. Et les autres dysfonctions sexuelles, spécifiées ou non spécifiées

4) Trouble

Enfin, on parle de trouble sexuel lorsque la dysfonction sexuelle entraîne un état de souffrance.

Des évolutions sociétales majeures

Dans le domaine de la santé sexuelle, il y a eu des évolutions sociétales majeures au cours des dernières décennies.

  • La définition récente de l’OMS est nettement plus inclusive que celle de 1974
  • La reconnaissance médicale des troubles sexuels est également un phénomène nouveau, car il a été longtemps considéré que les troubles sexuels étaient des problèmes de psychiatres
  • Les plannings familiaux, qui ont été renommés récemment en « centres de santé sexuelle ».
  • etc.

La sexualité érotique et non plus uniquement procréative

Ce n’est plus uniquement la reproduction qui est au centre de la sexualité humaine, mais également la dimension du plaisir, du bien-être et du consentement, du respect de soi et du respect des autres.

Le passage entre l’amour (sentiment) et la jouissance de la sexualité (plaisir érotique sexuel) n’est pas une continuité naturelle, mais le résultat d’un apprentissage.

Le « sexe » n’est plus un tabou  

Le sexe s’expose dans la société et envahit la sphère intime (pubs, TV, series, etc.)  et pourtant il est toujours difficile d’en parler… surtout quand ça ne va pas, qu’on ne se sent pas « performant ». 

Il est même difficile d’en parler à un professionnel de santé quand ça ne va pas dans sa sexualité.

Un sentiment d’illégitimité de la part des patients

Comme l’explique très bien le Dr André Corman (sexologue), lors de son intervention au Sommet de la Santé Sexuelle du 4 septembre 2021 : il y a encore beaucoup de honte associée à un sentiment d’« illégitimité médicale » de la part des patients3.

Par exemple, les personnes d’un certain âge, déjà soignées pour des pathologies potentiellement graves (cancer de la prostate, etc.), vont avoir tendance à penser que leur difficultés sexuelles sont secondaires ; que leur médecin fait déjà beaucoup pour elles, et qu’ils ne vont pas l’ennuyer en plus avec ça…

Et pourtant non, ce n’est pas un point secondaire de la santé… surtout quand on sait maintenant que la sexualité est un facteur protecteur de la santé en général4

Le soignant pédagogue

Le soignant se doit d’être pédagogue, bien informé sur les réactions sexuelles humaines pour en transmettre l’explication à ses patients, car il y a une pédagogie et un apprentissage pour arriver au plaisir et à une sexualité épanouie.

Il persiste encore plein de fausses croyances chez les jeunes :

  • chez les filles qui pensent que c’est normal que les premières fois soient douloureuses
  • suivant les cultures ou les religions, certaines filles peuvent croire que c’est normal que cela soit le garçon qui décide, ou qu’il est normal de devoir se forcer
  • les garçons, surtout les jeunes, avec les images véhiculées par la pornographie ont beaucoup de fausses croyances sur le fait qu’il faut «  durer pendant des heures », qu’il faut un sexe énorme, etc.

Il est donc important de déconstruire ces fausses croyances, mais également de rappeler les droits sexuels (CF plus haut).

Le rôle du soignant est, en effet, également de rappeler qu’une bonne santé sexuelle et une sexualité épanouie c’est une sexualité qui doit être vécue sans violence, sans douleur, sans coercition et sans discrimination.

C’est pour cette raison que le soignant doit être formé, informé et avoir des connaissances fiables, basées sur les recherches scientifiques et sociétales et non biaisées par ses propres croyances.

Il faut aussi avoir des notions sur les fonctionnements du couple, qui reste le modèle central de lien affectif, relationnel dans notre société actuelle, il faut donc le prendre en compte. C’est d’ailleurs la première préoccupation des Français5. Et l’on sait aussi comme ce lien relationnel peut être fragile, fragilisé.  

Il faut pouvoir comprendre dans un premier temps et expliquer comment fonctionnent l’excitation, chez l’homme et chez la femme, le désir, etc.… Cette interaction complexe entre amour et sexe.

Pédagogie et démarche proactive des soignants

Le soignant peut lui-même se trouver mal à l’aise, intimidé face aux questionnements d’un patient, face à des sujets qu’il maîtrise mal… de fait, il ne va pas nécessairement s’impliquer plus que ça dans la prise en charge du dépistage et de la pathologie sexuelle, ce qui risque, par un effet miroir, de renforcer la difficulté du patient à en parler3.

Si le soignant ne sait pas quoi répondre ou ne sait pas à qui orienter, le patient va penser que son problème n’est pas si grave que cela ou qu’il ne nécessite pas de déranger le médecin pour cela.

Le problème est que la santé sexuelle est un sujet qui échappe de plus en plus aux soignants : aujourd’hui, ce sont de plus en plus les influenceurs (y compris des acteurs pornos) qui se chargent de dispenser des conseils sur la sexualité, allant de conseils basés sur leur propre expérience à des thérapies payantes en ligne, basées le plus souvent sur leur propre expérience, car ils n’ont pas de formation autre.

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Références

  1. WHO (2006). Defining sexual health – Report of a technical consultation on sexual health 28–31 January 2002, Geneva. Sexual Health Document Series. Gene- va, World Health Organisation.[]
  2. DSM-5 – Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux Broché – 17 juin 2015[]
  3. Corman A. Le soignant confronté à la demande sexuelle du patient, Sommet de la santé sexuelle, 4 septembre 2021.[][]
  4. Cao C et Al. Trends in Sexual Activity and Associations With All-Cause and Cause-Specific Mortality Among US Adults. J Sex Med. 2020 Oct;17(10):1903-1913. doi: 10.1016/j.jsxm.2020.05.028. Epub 2020 Jul 12. PMID: 32665214.[]
  5. Brenot, Philippe. 2014. Un jour mon prince… Rencontrer l’amour et le faire durer. Paris: Les Arènes.[]